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A La Réunion, des scientifiques alertent sur les méfaits de la « chasse touristique » à la baleine

Une baleine à bosse de 40 tonnes qui surgit de l’océan dans un saut, provoquant un fracas aquatique et deux murs d’éclaboussures ; une mère et son baleineau qui émergent à la surface de l’eau en cheminant paisiblement. A La Réunion, la saison des baleines offre un spectacle naturel dont raffolent les habitants de l’île et les touristes.
Chaque année, entre mai et octobre, les cétacés longent les côtes de l’île en remontant de l’Antarctique vers les eaux chaudes de l’océan Indien, pour s’accoupler ou pour que les femelles mettent bas dans des sites de faible profondeur. L’observation des baleines depuis un bateau ou avec des mises à l’eau de nageurs est devenue une activité commerciale en plein essor. Malgré une réglementation préfectorale visant à une approche respectueuse, des scientifiques locaux alertent sur cette pression touristique croissante et sa compatibilité avec le bien-être des animaux.
« Nous sommes passés de quelques opérateurs il y a dix-quinze ans à environ quatre-vingts aujourd’hui, décrit Jean-Marc Gancille, porte-parole de l’association Globice, fondée en 2001 pour mieux connaître et protéger les cétacés à La Réunion. La chasse à la baleine d’un point de vue touristique est de plus en plus intense. Il existe une attente, une impatience du côté de la clientèle, toujours plus exigeante, avec une promesse des plus belles images et des plus beaux sauts amplifiés par les réseaux sociaux. »
La règle autorisant la présence de cinq bateaux dans une zone de 300 mètres autour de l’animal est globalement respectée. Mais les scientifiques s’inquiètent de la rotation des embarcations qui s’enchaînent toute la journée. « En 2023, avec un nombre record de baleines [1 156 recensées par Globice], il y avait des animaux pour tout le monde, souligne Audrey Cartraud, cheffe de projet pour l’équipe Quiétude, qui milite pour l’observation respectueuse des cétacés au sein du Centre d’étude et de découverte des tortues marines. En 2024, il y en aura environ trois fois moins [le nombre d’animaux varie naturellement d’une année à l’autre sans que les scientifiques puissent l’expliquer], mais avec toujours autant de bateaux. Voire plus. Cela pose problème. La situation actuelle n’est plus soutenable. »
D’autant plus que la mise à l’eau de nageurs équipés de palmes-masque-tuba et de combinaison s’est banalisée. Une pratique autorisée et encadrée à La Réunion, avec des horaires et des règles d’approche, alors qu’elle est interdite dans beaucoup d’autres sites mondiaux d’observation des baleines. Ce qui interpelle toujours les scientifiques étrangers.
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